La dérive des sacrifiés : pour Mémoire du silence |
Cairn de l'embarquement : pour Rick Forrestal |
Loup solitaire : pour Danièle Duteil |
Brightness : à Guy Allix |
Cairn de l'absence : à Marie-Josée Christien |
Le conte en marche des pierres noires : pour Hélène Phung |
La parole donnée : pour Thibault Germain |
L'attente : pour Erin |
Les mémoires de Toussaint : pour Epamin' |
D'une vie à l'autre : à Paul Quéré |
Gnomon du Golfe : pour Marie |
La jonction : pour Joelma. |
L'éternel signal : pour Nathanaëlle |
Les demoiselles des Sept Îles : pour Camino Roque |
La rencontre : pour Anne-Marie Santiago |
Sérénité : pour Ariane, Cléa et Emmanuelle |
A Marie-Claude...
Lampedusa
J'ai repéré une très grosse pierre qui ne devrait pas tarder à être cernée par la marée montante. Dans deux heures, ce sera fait.. Je suis arrivé sur la plage par l'Est. L'océan est gris, l'estran sans un être humain, le soleil,pâle au travers des nuages.
Avant même de commencer mon installation, je les vois, ces êtres abandonnés de tous, transits de froid dans leurs longs manteaux de nuit. Ils guettent, sans trop d'espoir, l'origine du monde. Il viendra de l'Est, le cercle d'or, mais il sera trop pâle pour les réchauffer. Ils ne le verront pas, le soleil espéré, ces hommes, femmes, enfants, pétris de brumes qui s'accrochent à leurs lambeaux de rêves. Les enfants comprennent cette chose : exister ne sera que provisoire sur ce cailloux. Le silence des adultes les envahit. La mer bat le rocher. Ils deviennent des souvenirs.
J'ai passé beaucoup de temps à rassembler les pierres nécessaires à réaliser cette scène. Je vais les chercher loin. Je les mets en place, elles tombent, comme des dominos. Je recommence. Le vent ne m'aide pas. Il est important, pour moi, de délivrer ce message à l'océan, pour conjurer ces cris de haine : jetez-les à la mer.
L'homme invente, sans cesse, l'inimaginable, encore une fois et sacrifie une partie de l'humanité. Lorsque je quitte la plage, le gros rocher est entièrement couvert par la mer.
Présences...
Ce n'est pas facile d'appartenir à la foule des anonymes et c'est pourtant là que tout se révèle. A force d'approcher l'évidence d'une disparition certaine, à force de me tenir en marge du bruit des foules, j'ai retrouvé cette liberté de mon enfance rebelle.
Si je capte une belle lumière, je la partage avec le paysage, ou, avec l'oiseau de passage. J'aime voir au-delà de ce ce que ma vue propose. Sans émotions, pas de basculement, pas de passage de la ligne, pas d’éblouissements ni de frissons possibles.
Les présences ne peuvent s'expliquer ni se fabriquer. Elles sont la preuve du lâcher-prise, de la vraie connexion avec les forces vives de la nature. Aucune pierre n'est muette, chaque conteur le sait. Parfois, se tiennent-elles dans la retenue, mais c'est tout.Chaque pierre reçoit, contient et transmet sa part d'univers à qui sait l'approcher, l'écouter. Ainsi, l'outre monde peut-il être contacté de cette façon et de mille autres encore.
Lac
Si j'ai pris le temps de descendre jusqu'au lac asséché, c'est que ce voyage a son importance. Le dessous des choses parle, l'épaisseur des mots, comme le dessous du niveau de l'eau où je vais installer plusieurs cairns.C'est le royaume de la mort annoncée, mais c'est aussi une chance de prendre place dans cette immense plaine éphémère. J'y élève trois cairns : Celui de l'absence, celui du signal et celui du conte en marche des pierres noires.
Presqu'Île de Locoal-Mendon
Un fort vent de 70km heure est annoncé. Il est bien là. Je m'engouffre dans le chemin de Cadoudal et décide de traverser la presqu'île de part en part. Je remonte le cours de l'histoire et passe de la légende à la réalité. Lorsque j'arrive à découvert sur la ria, le vent me fouette le visage. Je veux pourtant élever un très grand cairn dans cet endroit magnifique et sauvage. Je transporte de très grosses pierres pour en assurer la base et monte l'ensemble jusqu'à 1;90 mètre. Ce cairn à fière allure et je peux continuer ma route. Il portera le nom de cairn de l’embarquement.
Roger Dautais
Chambre
de
combustion
solaire
musique
fission
Le
hasard y fait
feu de
toutes ses flûtes
La
nécessité
bois de
toutes ses cordes
Poursuite
musicale
érubescente
d’un
vivant probable
Strette
d’une
fugue de l’amorphe
Avant
l’oreille
Avant
l’œil
Avant
le point
d’eutexie
de tous
les sens
Ou bien
encore
noctiluque ovni
au
space opéra
des
sphères
sonate
de l’être
humain
Diastole et systole
du
porphyre
au sein
de la terre
Extase
matérielle
Dans
l’aube
cramoisie
le
brasillement solaire
tango
Paul
Quéré
***
LES FOUS
Les fous s’en vont par deux
sur la route des songes
Sans regret de la nuit qui
bat leurs mains de pauvre
Ils ne sont ni surpris ni
las d’être chassés
Tant leur visage est pur et
leurs pas insouciants
Ils ont fui la grand ville
aux faces redoutables
Aux cheveux arrachés par les
mains des trottoirs
Trop de voix les frôlaient
et trop d’yeux sans savoir
Où toucher de la vie le cœur ou la cadence
Si vous voyez passer deux de
ces gens du rêve
Et le sang barbouillé de
joies qu’on ne sait pas
Ne les arrêtez pas car un
fou qui s’éveille
C’est un espoir qui meurt.
André Daviaud *
*http://andredaviaud.free.fr/